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MOINEAUX SANS NID N° 100

17 Janvier 2012, 09:00am

Publié par nosloisirs

100 R I V A L E S

 

— Alice ! s’écria Robert en se levant.

— Pardonnez-moi, Robert ! Je sais que je n’aurais pas dû entrer ici, mais ...

— En effet, répliqua-t-il les yeux étincelants de colère, il me semble que je suis chez moi !

Alice eut un sourire étrange, puis reprit avec force :

— Je ne pouvais, cependant, permettre à cette femme de te berner de nouveau !

— Ce fut au tour de Valérie de sourire, cette fois, mais avec un mépris dédaigneux que soulignait son silence. Elle ne ressentait ni jalousie ni rancune envers Alice, mais elle devinait qu’elle était pire encore que ses deux frères. D’autre part, son portrait, entrevu dans l’atelier, n’était-il pas la preuve la plus évidente de l’amour que lui portait toujours l’artiste ?

— Vos insultes ne peuvent me toucher, Madame. Je vous méprise trop !

Les yeux de son interlocutrice lancèrent de véritables éclairs. Elle allait répondre, mais Robert ne lui en laissa pas le temps.

— Tais-toi ! Dit-il sévèrement. N’oublie pas que tu es sous mon toit, et je ne saurai tolérer ...

— Ce que tu ne dois pas tolérer, interrompit-elle, c’est la présence de cette misérable chez toi !

— Si votre oncle pouvait sortir de sa tombe, intervint Valérie d’une voix glaciale, il dirait laquelle de nous deux est la plus indigne !

Une pâleur mortelle se répandit sur le visage d’Alice, mais elle se domina et s’exclama avec impudence :

— Je vous interdis de parler de mon oncle ! Vous ne pouvez parler que de deux personnes ; votre complice, cet assassin qu’est Marigny, ou votre amant, Georges Bertil !

Cette allusion à son ami d’enfance suffit à Valérie pour lui faire deviner qui avait été l’auteur de la fameuse lettre.

— Ainsi, s’écria-t-elle indignée, c’est vous qui répandez toutes ces infâmes calomnies ?

— Ce ne sont pas des calomnies, déclara Alice avec assurance, et je reconnais avoir éclairé Robert, afin de l’empêcher de retomber entre vos griffes. Oui, c’est moi qui lui ai révélé vos coupables relations avec monsieur Bertil.

« Maintenant, songea Valérie, je comprends tout ! »

Robert gardait toujours le silence, ce demandant comment celle qu’il aimait envers et contre tout se justifierait de cette dernière accusation.

— Cette femme, s’exclama Valérie en s’adressant au peintre, cette femme est l’être le plus vil et le plus méchant qu’il soit possible d’imaginer ! Je vous prie de me dire très exactement ce qu’elle vous a raconté sur mes relations avec Georges Bertil.

— Elle n’a pas été la seule a m’en parler, répliqua Robert d’une voix rauque, car cet homme m’a parlé de vous et m’a même remis une des lettres que vous lui aviez adressées.

— C’est impossible ! Protesta Valérie, Bertil ne peut avoir agi ainsi !

— C’est donc moi qui mens ? Murmura le jeune homme, amer.

— Qu’avez-vous donc trouvé de mal dans cette lettre ? Demanda Valérie étonnée. Je lui adressais mes condoléances pour la mort de ses sœurs avec lesquelles j’ai été élevée.

Robert ébaucha un geste las de la main.

— Vous ne parliez nullement de ses sœurs. Cette lettre contenait les phrases qu’une femme écrit en général à son amant, intervint méchamment Alice.

— Alors, ce papier ne venait pas de moi, affirma Valérie très tranquillement. Comment avez-vous pu croire, Robert ... ?

— Cette lettre était bien écrire par vous !

— Vous osez donc pré ...

— Je l’ai comparée avec celle que vous m’avez adressée, pour refuser l’argent que je vous avez envoyé, interrompit-il amèrement.

— Mon Dieu ! Mon Dieu ! Que de mensonges ! S’exclama l’infortunée jeune femme. On a été jusqu’à imiter mon écriture ! Oh ! Robert ! Robert ! Pour votre bien, au nom de l’amitié que je vous porte, éloignez-vous de cette femme ! Je ne sais ce qu’elle vous veut, mais ce n’est sûrement rien de bon, car je sais qu’elle était entièrement d’accord avec ses brigands de frères !

— Je regrette, mais ce que vous affirmez est faux, riposta sévèrement Robert, car je possède justement la preuve du contraire ...

— Vous vous trompez ! s’écria avec force la pauvre Valérie. Je ne veux ni me défendre ni me disculper à vos yeux ; je cherche seulement à écarter de vous un grand danger. Quelle est donc la preuve dont vous venez de parler ?

— Alice a cédé la moitié de sa part d’héritage à son jeune cousin. Si elle ne la lui a pas donnée tout entière, c’est uniquement parce que je m’y suis opposé, expliqua le peintre en jetant un regard plein d’admiration est suffisamment convaincant !

Cet argument pétrifia littéralement Valérie. Et Alice reprit d’un air triomphant :

— Inutile de continuer à vouloir nous confondre, et j’ai été vraiment sotte de m’abaisser à vous parler ! Dans quel but venez-vous ici ? Vous êtes indigne de mettre les pieds dans cette maison.

— Et vous êtes, vous, un vrai péril pour Robert ! Sachez donc qu’il m’aime et que je l’aime ! S’écria Valérie, exaspérée. Je suis d’ailleurs convaincue que votre geste cache quelque chose de diabolique, comme vous l’êtes vous-même. De plus, il est impossible que vous ayez tué votre oncle pour renoncer ensuite un fruit d’un tel crime !

— Tu entends cette vipère, Robert ? Hurla Alice, folle de rage. Elle ose me traiter de meurtrière ! Moi !... Cette ignoble accusation doit te faire comprendre toute la noirceur d’âme de cette misérable !

— Valérie, êtes-vous devenue folle pour oser prononcer de telles énormités ? Demanda sévèrement Robert.

En effet, cette accusation était trop invraisemblable pour que Robert puisse y croire, mais l’ex-gouvernante de se laissa pas intimider et, redressant fièrement sa jolie tête, elle assura :

— Je ne suis pas folle du tout. C’est Jacques qui a tenu ces propos durant sa maladie.

— Et les paroles prononcées au cours du délire d’un mourant suffisent pour vous persuader d’une pareille monstruosité !

— Oui, car le malheureux a dit également où le testament était caché, et je l’ai découvert. Donc, si l’une des deux choses est vraie, l’autre doit l’être également, affirma Valérie.

Lorsqu’elle écoutait derrière la porte avant de faire irruption dans l’atelier, Alice n’avait pu saisir que quelques mots de l’entretien et non tout ce que s’étaient dit les jeunes gens.

— De quoi voulez-vous parler ? S’écria-t-elle avec colère.

— Du testament écrit de la main de votre oncle peu de temps avant sa mort, répondit Valérie.

— Qu’est-ce que vous dites ? S’exclama Alice en frissonnant.

— En effet, Alice, Valérie vient de me le remettre, et je ne puis avoir aucun doute là-dessus, intervins Robert.

— Montrez-le moi donc, ordonna-t-elle d’un air de défi.

— Tenez, le voici, fit Montpellier en sortant la feuille du sous-main dans lequel il l’avait glissée et la plaçant sous les yeux d’Alice. Vous reconnaissez, n’est-ce pas, la signature du pauvre Julien, la mienne en dessous ainsi que celle d’un deuxième témoin.

— Ah ! Rugit mademoiselle d’Evreux d’une voix stridente, c’était donc la raison pour laquelle vous vous êtes introduits chez nous ?

— Oui, je voulais vous démasquer, vous et vos frères, avoua froidement Valérie.

— C’est également pour cela que vous avez dressé Anselme contre Jacques et provoqué cette horrible tragédie ? Demanda Alice, menaçante.

— Je n’ai rien provoqué du tout, se défendit Valérie avec mépris. Ce sont eux qui en sont venus aux mains par intérêt et jalousie.

— Vous mentez ! Cria Alice.

— Je ne mens jamais, protesta énergiquement Valérie. Jacques se repentait de tout le mal qu’il avait fait et s’apprêtait à révéler votre secret, lorsque Anselme pour l’empêcher de parler, lui a jeté de toutes ses forces, le chandelier à la tête, le blessant ainsi gravement ; voilà la vérité !... Mais on est toujours puni par où on a pêché car, dans son délire et sa fièvre, Jacques a encore parlé et m’a ainsi appris que vous aviez hâté la fin de votre malheureux oncle.

— C’en est trop ! Je ne puis supporter plus longtemps d’aussi ignobles calomnies ! S’exclama Alice en se tournant vers Montpellier. Chasse immédiatement cette femme où je ne réponds plus de moi !

— Je suis tout de même forcé d’admettre, qu’elle a découvert le testament, murmura Robert en hochant la tête.

— Et après ? Qu’est-ce que cela signifie ? Tu savais que mes frères s’en étaient emparés, et je suis ravie que tu l’aies en ta possession. Cependant tu ne peux admettre tout le reste, Robert !

— N ... non ...sans doute, bredouilla-t-il en soupirant.

— Malheureux ! S’écria Valérie, l’air aussi épouvanté que si elle le voyait soudain disparaître au fond d’un précipice, vous aimez donc cette maudite femme ?

— Que je l’aime ou non, répliqua brusquement le peintre, je repousse une telle accusation.

— Ce n’est pas moi qui l’accuse, précisa Valérie ; je ne fais que répéter les paroles prononcées par son propre frère sur son lit de mort. C’est plutôt elle qui m’a insultée, et ...

— Assez !... Assez !... Coupa Alice. Je ne puis supporter une telle impudence, et si tu ne la renvoies pas sur le champ, Robert, c’est moi qui vais partir pour ne plus jamais remettre les pieds chez toi !

— Je dois auparavant terminer la rédaction de ce reçu, dit le jeune homme en hésitant. Laisse-nous, Alice et attends-moi quelques minutes dans la salle à manger ... D’ailleurs si tu n’étais pas entrée dans mon atelier, tu te serais évité cette entrevue plus que pénible.

Il a reconduisit jusqu’à la porte qu’il referma derrière elle lorsqu’elle fut sortie de la pièce.

Alice, alors, se précipita au téléphone et appela le commissariat le plus proche ...

Sans lever les yeux sur Valérie, Robert s’installa de nouveau devant son bureau et recommença à écrire. La jeune fille gardait le silence.

Elle ne lui en voulut nullement. Au contraire, elle ne pouvait se défendre d’un sentiment de compassion pour le peintre qu’elle croyait épris d’Alice.

« Elle m’a volé son amour, se disait-elle ; s’il s’agissait d’un être pur et loyal, je serais heureux de leur bonheur, mais sachant ce qu’elle est, je dois absolument empêcher que Robert se laisse prendre à son charme perfide. Evidemment, elle est tellement jolie, et si séduisante, qu’il lui a été facile de me supplanter, surtout après les terribles accusations qui pèsent sur moi ! »

Valérie s’approcha de Robert, et tout bas, afin de ne pas se faire entendre d’Alice, au cas où elle écouterait derrière la porte (comme elle l’avait déjà fait) elle murmura :

— Vous l’aimez, Robert ?

— Je vous ai déjà dit que je l’estimais beaucoup, répondit-il avec le plus grand calme ; elle m’a donné de nombreuses preuves de sa loyauté et je sais qu’elle possède un des cœurs les plus généreux de la terre.

— C’est faux ! Soupira la pauvre Valérie. Un jour, vous en conviendrez, mais pourvu qu’il ne soit pas trop tard !

— Valérie, reprocha-t-il en jetant son stylo sur la table vous allez finir pas me rendre fou ! Que voulez-vous ? Que cachent ces paroles, et qu’attendez-vous de moi ?

— Je n’attends absolument rien de vous, ingrat ! Répliqua-t-elle peinée. Je veux seulement que vous finissiez d’écrire cette déclaration et que vous me la remettiez.

— Pourquoi me traitez-vous d’ingrat, alors que vous savez très bien que c’est faux ? S’écria-t-il en fronçant les sourcils. Je crois vous avoir suffisamment expliqué les raisons de mon changement d’attitude envers vous. Vous n’avez pas prouvé la fausseté de mes accusations envers vous, pas plus que de celles dont vous aurez à répondre devant la justice. Mais le jour où vous le ferez ...

— Il sera alors trop tard pour tous deux, acheva-t-elle tristement. C’est certainement la dernière fois que nous nous voyons et nous parlons avant de nous retrouver devant le tribunal.

Robert la fixa un instant, perplexe puis reprit :

— Que comptez-vous faire à présent ?

— Je veux essayer de défendre les droits de Pierrot pour son héritage et pour son nom, répondit-elle avec fermeté.

— C’est absurde, et c’est également une raison de plus pour m’empêcher de croire en vous ! S’exclama Montpellier.

La jeune femme haussa les épaules.

— Tant pis ! Soupira-t-elle. Vous me croirez seulement lorsque j’aurai prouvé ma loyauté et que Pierrot, cet enfant de la rue, persécuté par cette femme t’ ses frères, est bien le véritable fils de votre ami. Maintenant, achevez vite ; j’ai hâte de m’en aller !

— Tout de suite, fit sèchement Montpellier.

— Qui aurait pu croire que nous en arriverions là ! Murmura-t-elle douloureusement.

— Je ne l’aurais jamais imaginé ; et pourtant, vous l’avez bien cherché ! S’écria le peintre avec reproche.

— C’est le destin qui, l’a voulu, reprit-elle. Qui de nous deux se trompe ! Vous, en me jugeant ou moi, en faisant la même chose ?

— Cependant, je n’ai pas changé, et si vous l’aviez réellement désiré, je vous aurais aimée de toute mon âme jusqu’à la mort.

— Oh !... Dire que vous avez perdu la confiance que vous aviez en moi !

— Il y a tant de choses contre vous !

— Et vous y croyez comme tout le monde ! Pour vous aussi, je suis une femme perverse et criminelle, et vous n’avez aucune pitié de ma douleur !... Vous avez raison, je le mérite ... Tandis qu’elle ... celle que vous aimez maintenant, a droit à votre amour, votre estime, votre respect ... Elle est si bonne, si pure !... Moi, j’ai été la maîtresse de Marigny, de Georges Bertil ... Je ne suis plus qu’un misérable objet de mépris !... Dépêchez-vous, je vous en prie. Je ne veux pas partir d’ici, sans cette attestation, parce qu’elle décidera du sort d’un enfant qui, lui, me respecte et m’aime ... Tous me renient, jusqu’à mon père, excepté des deux petits moineaux sans nids que les méchants persécutent !

— Je vous jure qu’il n’existerait pas de plus grande joie pour moi que de vous rendre ma confiance et mon cœur, déclara Robert avec force. Prouvez-moi que vous en êtes digne, Valérie, et que vous avez été accusée faussement !

— Dans ce cas, où serait votre mérite ? Murmura-t-elle tristement. Ce que j’appréciais tant en vous était cette certitude que vous aviez de mon innocence, de ma loyauté. Vous l’avez perdue et notre amour n’est plus pour moi ce qu’il était autrefois ...

— Justifiez-vous donc, si la chose est possible, pria-t-il ardemment. Parlez ! Je vous en conjure au nom de ce que vous avez de plus cher ici bas, Valérie !

— Je ne puis le faire qu’en disant la seule vérité, répondit-elle.

— Alors, dites-la vite ! Insista-t-il haletant.

— Vous m’avez accusée d’être allée rejoindre Jean Marigny à ma sortie de prison, n’est-ce pas ? Questionna-t-elle doucement.

— Je l’ai dit parce que je vous ai suivie, avoua-t-il.

— Je l’ignorais qu’il s’y trouvait.

— Pourquoi y êtes-vous allée, dans ce cas ?

— Dans le seul but d’y rencontre un homme qui était au courant de toute la vie de Marigny, expliqua la malheureuse ;

— Mais pourquoi ?

— Parce que je pense ne pas avoir été la seule femme victime du pouvoir hypnotique de Jean, et je tenais à savoir si cet homme ne connaissait pas une autre victime de Marigny. Cela m’aurait servi à prouver mon innocence.

— Vous ignoriez que Marigny s’était réfugié là-bas ? Questionna Robert en la fixant intensément.

— J’avais la conviction qu’il avait quitté Paris.

— Et ce ... cet ami de Marigny à donc disparu ? Demanda Robert, visiblement méfiant.

— Hélas !

— Ainsi, vous ne pouvez rien prouver, constata le peintre et moi, je ne puis m’empêcher de douter !

— C’est exact, reconnut-elle douloureusement, et vous douterez toujours en moi ! Mais changeons de sujet et arrivons-en à Bertil.

— Que voulez-vous dire ?

— Oh ! Rien, mais je voudrais que lui-même répéta devant moi ce qu’il vous a dit.

— A-t-il oui ou non, été votre amant ? Demanda l’artiste en la regardant droit dans les yeux.

— C’est un horrible mensonge, Robert ! S’exclama-t-elle avec force. Je vous jure sur la mémoire de ma mère ! Allons le voir tout de suite, et je vous jure que devant moi, il n’osera jamais répéter de telles calomnies. Nous sommes des amis d’enfance et Georges était un véritable frère pour moi. Il est incapable d’une pareille lâcheté !

— Pourtant il l’a commise, affirma froidement Montpellier car lui-même m’a remis cette lettre et m’a confié que vous étiez la femme le plus fausse et la plus rusée qu’il ait jamais connue.

— Quelle méchanceté ! Gémit l’infortunée Valérie. Je ne puis le croire ! Et vous mentez ... Je ne sais pourquoi, mais vous mentez ! Georges est convaincu de mon innocence et il était venu me rendre visite à l’hôpital uniquement pour me l’affirmer et m’offrir son aide, il m’a remis les photographies prises ensemble autrefois lors d’une fête donné à l’occasion de mon prix de piano au Conservatoire ... Non, Georges Bertil est incapable d’une telle infamie ! J’irai le trouvé en sortant d’ici et je l’emmènerai ici pour vous convaincre de votre erreur ... Maintenant donnez-moi vite ce papier. C’est moi qui doute de vous maintenant, et je ne suis pas loin de vous croire complice des misérables neveux de votre pauvre ami !

Il sursauté à ces paroles et chercha à se défendre.

— Valérie, écoutez-moi ...

Elle l’interrompit avec violence :

— Non ! Et je ne veux plus jamais entendre parler de vous ni de votre ... fiancée ou amie ... Même si tout me condamne, je jure devant Dieu que je suis innocente et honnête ! C’est vous qui êtes tous des menteurs et des traîtres !

Devant tant de fermeté et constatant comme elle défendait son ami d’enfance – qui l’avait pourtant si lâchement calomniée – Robert sentit d’autres doutes, très différents des précédents le gagner, et son âme fut pénétrée d’espoir.

Il s’approcha de la pauvre femme, lui saisit les deux mains et la fixa avec passion, essayant de lire en son cœur pour y discerner la vérité.

— Valérie ... Valérie, murmura-t-il, bouleversé, je vous aime, vous le savez. Dites-moi la vérité, toute la vérité au nom du Ciel ! Je suis tellement malheureux ! Et s’il subsiste en vous un peu de franchise ...

— Un peu de franchise ? Interrompit-elle, indignée. Comment osez-vous me parler ainsi ? Je ne vous ai jamais menti je vous le jure !

— La vérité, je vous en supplie ! Insista-t-il haletant.

— Je vous l’ai toujours dite, assura Valérie. Maintenant, il est trop tard ; c’est moi qui ne crois plus en vous désormais !

— Non, non, ne me dis pas cela ! S’écriai-t-il. Allons tout de suite voir Bertil, lui parler. Je ne puis plus supporter ce doute qui me tue à petit feu !

Mais elle secoua négativement la tête, le visage sillonné de larmes amères.

C’est fini Robert, refusa-t-elle, et je n’ai pas à me justifier à vos yeux ... Tout m’est tellement égal à présent !

Brusquement elle le repoussa, le forçant à lâcher ses mains qu’il serrait toujours entre les siennes, et, levant sur lui un regard lourd de reproches, elle s’écria :

— Je vous déteste ! Je vous déteste, maintenant ! Vous m’avez trop cruellement offensée.

Une telle angoisse l’opprimait qu’elle respirait difficilement. Elle chancela en reculant, les mains étendues, cherchant à s’appuyer sur un meuble pour ne pas tomber.

— Qu’avez-vous Valérie ? S’écria Robert, effrayé, en se précipitant à son secours pour la soutenir.

Elle l’arrêta d’un geste.

— Ne me touchez pas ! Murmura-t-elle dans un souffle.

— Je vous supplie de me laisser vous aider, Valérie.

— Non, non, répéta-t-elle, devant si pâle qu’il crut à une crise cardiaque et sonna pour demande du secours ...

 

( A SUIVRE LE 20 JANVIER )

 

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