UN POEME * LES SERVANTES * IL FAUT BIEN RIRE UN PEU
LA COLLINE
Cette colline est belle, inclinée et pensive
Sa ligne sur le ciel est pure à l'horizon
Elle est un de ses lieux où la vie indécise
Voudrait planter a vigne et bâtir sa maison.
Nul pourtant n'a choisi sa pente solitaire
Pour y vivre ses jours, un à un, au penchant
De ce couple coteau doucement tutélaire
Vers qui monte la plaine et se hausse le champ.
Aucun toit n'y faire luire, au soleil qui l'irise
Où l'empourpre, dans l'air du soir ou du matin,
Sa tuile rougeoyante où son ardoise grise...
Et personne jamais n'y fixa son destin.
Et tous ceux qui passant un jour devant la grâce
De ce site charmant et qu'il auraient aimé,
Elle ont senti renaître en leur mémoire lasse
La forme pacifique et le songe embaumé.
C'est ainsi que chacun rapporte du voyage
Au fond de son cœur triste et de ses yeux en pleurs
Quelque vaine, éternelle et fugitive image
De silence, de paix, de rêve et de bonheur.
Mais sur la pente verte et lentement déclive
Qui donc plante sa vigne et bâtit sa maison ?
Hélas ! Et la colline inclinée et pensive
Avec le souvenir demeure à l'horizon.
Henri de Régnier
LES SERVANTES D'AMÉRIQUE IRONT AU CLUB S'IL LEUR PLAIT
Voici bien longtemps que les vaudevillistes français avaient inventé le personnage de la bonne qui réclame deux heures par jour pour étudier son piano. Rien n'est plus invraisemblable de ce qu'imaginent les humoristes puisque un syndicat bizarre vient de se fonder en Amérique, le syndicat des domestiques-femmes, qui porte le nom un peu long de National servant Girl's Union of America. Dans une réunion générale qui vient de se tenir à Chicago ces dames ont voté les statuts suivants :
1° Le travail ne pourra pas commencer avant cinq du matin et cessera après le repas du soir, dès que la vaisselle sera enlevée et lavée. Les domestiques auront le droit de disposer de deux heures tous les après-midi et d'au moins deux soirées par semaine.
2° Dans le cas où les domestiques désireraient faire partie d'un club, les maîtres n'ont pas le doit de s'y opposer. De même ils n'ont pas le droit d'empêcher les domestiques de recevoir un petit nombre d'amis à condition que les domestiques fournissent les victuailles, etc.
3° On n'a pas le droit d'interdire à des personnes amies l'accès de la cuisine et du corridor de l'escalier de service. Les membres de la famille n'ont pas le droit d'intervenir en des occasions pareilles et d'interrompre leurs conversations.
4° Les maîtres qui se refuseraient à reconnaître ces conditions seront boycottés par tous les membres de la National servant Girl's Union of America.
IL FAUT BIEN RIRE UN PEU !
Extrait du programme d'une grande ménagerie foraine :
« Le célèbre dompteur Marco voyage avec une troupe unique de grands fauves exotiques. Il est accompagné de la gentille dompteuse Miss America et du dompteur Alexandro. En somme des animaux superbes et de vaillants caractères »
Entre bohèmes.
— Tu as de l'argent pour payer l'addition ?
— Non et toi ?
— Moi non plus.
— Si on en demander au patron ?
— Tu le connais ?
— Non et toi ?
— Moi non plus, mais on pourrait dire au garçon de nous présenter
Mariage rompu.
— Comment monsieur, c'est maintenant que vous venez me dire que vous n'épouserez pas ma fille ! Vous n'y pensez pas ! Les bans sont publiés !
— Les bans ! Eh bien ! Faites comme moi.
— Qu'est-ce que vous faites ?
— Je m'assois dessus.
Entre mari et femme.
— Mais malheureuse , si tu me rompais je t'arracherai les yeux !
— J'aimerais mieux les cheveux !
— Les cheveux ! Pourquoi ?
— Parce qu'ils ne sont pas de moi .
Les enfants terribles :
— Ainsi, mon petit ami, vote papa parle quelquefois de moi ?
— Oh ! Oui monsieur, il a même dit qu'il était bien sûr de ne jamais revoir les 20 francs qu'il vous a prêtés un jour !
ELLE — renoncez définitivement à ma main ; je n'épouserai qu'un homme qui sera tout le contraire de moi.
LUI — Vous ne trouverez pas ; vous savez bien que la perfection n''est pas de ce monde.
— Vous êtes orfèvre, monsieur Josse.
— Moi je suis pour la grande peinture de vases scènes largement traitées. Les petits tableautins me font rire.
— Vous êtes critique ?
— Non, je suis encadreur.
On parle d'un raseur.
— Le pauvre garçon s'ennuie.
— Oui, mais; il n'est pas égoïste, il s'ennuie des autres.
C'est très probable.
Lu, dans une petite ville de province, sur la porte de la maison d'un notaire, un jour de marché :
« Le public est prévenu que M. Henry du Puy Notre Dame par suie de décès, cesse ses fonctions de notaire »
— Je ne sais pas ? Je me marie.
— Ah bast !
— Mon Dieu, oui. Je parie que tu ne sais pas ce que fais ma future ?
— Oh ! si. Elle fait une bêtise.
On peut lire la « perle » suivante sur la porte d'un cabaretier de village à quelques pas d'un cimetière.
AU RETOUR DES CONVOIS
Cabinets particuliers pour les personnes
qui désirent pleurer seules.
Vins et Liqueurs de premier choix
— Pourquoi pleures-tu ? Demande-t-on à Martine.
— Je pleure parce que mes larmes coulent.
Pierre et Paul sont deux gros fumeurs et ils sont en tain de lire des articles dans lesquels on dénonce les méfaits du tabac. Cela les laisse indifférents, mais Pierre, à un moment donné, dit d'un ton pensif :
— Est-ce que tu rends compte qu'il y a suffisamment de nicotine dans un cigare pour tuer un âne ?
Paul hoche la tête et répond :
— Oui, bien sûr, mais les ânes ne fument pas.
Après un naufrage cinq passages ont pu se sauver dans un canot et ils ont récupéré quelques boites de conserves ainsi qu'un jeu de cartes.
Au bout de quelques jours les conserves sont épuisées et on va tirer à la courte paille pour savoir qui sera mangé lorsque l'un des naufragés s'écrie :
— Mieux vaut manger Louis, c'est le seul qui ne sache pas jouer à la belote.
Deux messieurs à bord d'un bateau qui s'apprête à lever l'ancre voient sur le quai un monsieur qui court.
L'un d'eux parie cent francs que ce passager attardé va manquer le départ. L'autre tient le pari.
Et le monsieur arrive tout juste. Dès qu'il est à bord, le bateau s'en va. Le perdant paie ce qu'il doit et dit :
— C'est tangent, mais vous avez gagné.
— J'en étais sûr. C'était le commandant de notre bateau.
Lebleu est un jeune soldat qui vient d'être incorporé. Il y a quinze jours qu'il est à la caserne. Le dimanche suivant il a chez un de ses amis qui lui demande :
— Le matin, qu'est-ce qu'on vous donne ? Du thé ou du café ?
Le solda réfléchit et finit par avouer :
— Je n'en sais rien. On boit quelque chose mais on ne nous a pas encore dit ce que c'était.
Un instituteur vient d'expliquer à ses élèves de quelle façon Newton avait trouvé la théorie de la gravitation en voyant tomber une pomme. Puis il demande :
— Jacques, avez-vous bien compris ?
— Oui, monsieur, si Newton avais été à la campagne au moment où les pommes n'étaient pas encore mûres, l'humanité aurait été en retard de plusieurs siècles.
Un musicien trompette de son état, vient trouver son concierge :
— J'aimerais que vous me rendiez un grand service, dit-il. J'ai un gala ce soir, mais je ne peux pas y aller. Si vous me remplacez, il y a mille francs pour vous.
— Mais, répond le concierge, je ne sais pas jouer de la trompette, moi !
— Cela n'a aucune importance. Il y a six trompettes dans l'orchestre, vous fera semblant de jouer !...
— Dans ce cas je suis d'accord dit le concierge.
Le soir, le rideau se lève sur l'orchestre . Les violions préludent puis le chef d'orchestre fait signe aux trompettes d'attaquer. Et c'est le silence total !... parce que c’était six remplaçants.
REVUE NOS LOISIRS DU 5 JUILLET 1908